ROMARIC HARDY

.TEXTES

.PUBLICATIONS

.CV.CONTACTS

.VUES D'EXPOSITIONS

 Instants donnés Si la photographie a toujours à voir avec l’instant, celui qu’elle capture, circonscrit, inaugure même dès lors qu’elle rend visible ce que l’œil nu ne peut appréhender, les images de Romaric Hardy mettent en scène leur propre épiphanie en saisissant l’instant au vif de son surgissement. Images où les figures qui apparaissent sont comme incertaines de leur apparition, où des corps instables, tronqués ou fugitifs semblent jaillir des limbes qui menacent de les engloutir à nouveau. Dans une œuvre au titre programmatique (Manifeste), le bras dressé du photographe, situé au premier plan, actionne le déclencheur de l’appareil, dans le décor rudéral d’une banlieue industrielle que son poing fermé semble manquer d’attraper, tandis qu’un fil noir le relie à la boîte mécanique, comme à l’origine de l’image que nous avons devant les yeux. Dans Autoportrait à la farine ou la série des Chats, c’est de la nuit que les corps émergent. La lumière du flash qui les enveloppe crée une parfaite correspondance entre ce qui est vu et l’artifice technique dont cette visibilité procède. Comme précédemment, la saisie du motif devient celle de l’instant photographique lui-même. Sur la première image, l’artiste apparaît derrière un nuage de fumée blanche, comme un masque difforme qui en éclipse autant qu’il en révèle l’identité; sur les secondes, les félins, tapis sous des voitures en stationnement, braquent leurs yeux hagards sur l’objectif ou, apeurés, fuient le cadre de la représentation. La capture du visible révèle ici ses ratages. Si Romaric Hardy sait subtilement jouer avec toutes les contraintes de son médium, il a surtout le mérite de révéler, à travers elles, un regard humoristique et lucide sur la fragilité de la vie où l’énigme de l’être est aussi bien celle de sa disparition. Laurent Buffet